Maturité et vie intérieure : chemins d’évolution spirituelle

À l’occasion d’un colloque international de l’Université Catholique de l’Ouest (UCO) sur les neurosciences, Egdard Morin devait répondre à cette question : qu’est-ce qu’un enfant de 10 ans ne devra jamais oublier tout au long de sa vie ? Il répondait qu’il fallait que chacun se souvienne d’avoir eu 10 ans (voir entre la 1’40 et la 2’10 de la vidéo). Je me suis alors demandé s’il était possible d’avoir un tel souvenir, ce qu’il signifiait et finalement quel pouvait être la relation à nous-mêmes tout au long de la vie, ce qui était à la base de la maturité.


Le risque de l'anachronisme

Côtoyer un enfant, un adolescent ou un jeune adulte peut amener à se remémorer notre propre passé, lorsque nous avions leur âge : des situations plus ou moins précises nous reviennent en mémoire, des faits marquants se redessinent, agréables ou désagréables, des émotions refont surface, que l’on croyait enfouies.
Il est, par contre, plus difficile de se souvenir de la façon dont nous percevions le monde. En effet, notre personnalité est une construction continue qui nous fait souvent courir le risque de l’anachronisme avec nous-mêmes : nous nous souvenons du passé à l’aune de l’adulte que nous sommes aujourd’hui. Se souvenir d’avoir eu 10 ans est donc beaucoup plus difficile qu’il n’y paraît.


Une évolution par étapes

Depuis nos 10 ans, nous disons généralement que nous avons « mûri ». Les neurosciences progressent régulièrement dans la compréhension du fonctionnement et des évolutions du cerveau humain. Chez les enfants et les adolescents, le cerveau arrive à maturité à différents moments selon la « compétence » concernée : apprentissage, décision, etc. Les sciences s’intéressent beaucoup aux étapes de développement de l’enfant ou de l’adolescent, mais moins aux évolutions que nous vivons tous une fois adulte. Or, il est évident que nous ne pensons pas le monde de la même façon à 20, 30, 40, 50 ans… Qu’est-ce qui explique ces changements ? La plasticité cérébrale y est sans doute pour beaucoup, les connexions dans notre cerveau ne cessant de se modifier.


Une étude sociologique datant de 1991, s’attachant à comprendre la représentation des âges de l’existence par un groupe de jeunes étudiants, met en évidence une véritable mythologie.
On parle beaucoup de la « crise de la quarantaine » (aussi court soit-il, l’article de Wikipedia sur ce sujet est tout de même intéressant). On parle aussi de l’étape majeure de la retraite. Les accidents de la vie (deuils, accidents, attentats, maladie, etc.) marquent également l’existence et peuvent faire évoluer brutalement la personne que nous étions jusqu’alors et sa façon d’être au monde.


Le dictionnaire évoque la maturité comme « une période de la vie caractérisée par le plein développement physique, intellectuel et affectif ». Cette définition apparaît quasi énigmatique tant il semble impossible d’atteindre ce plein développement sur les 3 plans au même moment.


Les jalons de la vie

Bianka Zazzo est une psychologue française qui s’est d’abord intéressée aux enfants et aux adolescents. Progressivement, elle en est venue à interroger l’entité adulte car elle est l’« horizon de l’enfant ». En effet, même lorsque l’adulte montre des limites dans son comportement, et alors même qu’il peut casser quelque chose dans la figure idéale que l’enfant a construite, l’adulte continuera à incarner l’autonomie (dans l’action, les choix et les jugements). La psychologue a donc questionné le sentiment d’être adulte et tenté de comprendre ses liens avec le sentiment de maturité. Réalisée en 1969, cette étude dévoile des faits qui ne seraient peut-être pas si différents de ceux qu’une telle étude réalisée aujourd’hui dévoilerait.


Pour les femmes, les jalons de la maturation sociale étaient le travail, la vie indépendante, le mariage et la maternité, dans cet ordre, quel que soit le milieu social.
Pour les hommes, il fallait ajouter le service militaire. Les jalons étaient donc travail, vie indépendante, service militaire, mariage et paternité, mais l’ordre des 3 premiers variait en fonction du milieu social.


La maturité jamais atteinte

Certains jalons coïncident avec le sentiment de maturité. Les résultats des entrevues avec les personnes interrogées varient selon le sexe et le milieu social, mais il est intéressant de relever qu’à cette époque, une forte proportion de femmes du milieu social le plus élevé ne se sentait adulte qu’après la naissance du premier enfant.
Sans que ce soit systématique, le sentiment d’être adulte était souvent associé au fait d’être traité par la société comme un adulte. Le déterminisme social, le regard des autres, agit sur la perception qu’un individu a de lui-même, même s’il n’en a pas conscience.


Bianca Zazzo n’est pas restée à la surface des témoignages et a sondé la profondeur. Elle a interrogé les personnes pour savoir ce qu’elles regrettaient le plus de leur adolescence et quels étaient les avantages acquis, selon eux, avec l’âge adulte. Les résultats sont étonnamment disparates en fonction du milieu : pour les personnes de milieux moins élevés, les avantages sont essentiellement sociaux quand, pour les personnes de milieux plus élevés, ces avantages concernent davantage leur personne (équilibre, maîtrise, connaissance de soi).
La psychologue interroge également les personnes dans leur relation avec leurs enfants : en quoi souhaitez-vous que vos enfants vous ressemblent ou ne vous ressemblent pas, qu’est-ce que vous souhaiteriez leur éviter ?


Je vous livre ces questions afin que vous, lecteur, vous interrogiez vous-mêmes tant elles peuvent en révéler sur vous. Si vous êtes curieux des réponses apportées lors de l’étude, je vous laisse l’explorer.


Du temps pour se perfectionner

L’étude de Bianca Zazzo révèle que la maturité n’est pas un jalon de vie en soi et que les idéaux qui nous meuvent restent finalement souvent à distance. La psychologue conclut superbement en soulignant que c’est justement l’insatisfaction issue de l’incapacité à atteindre l’horizon idéal qui ouvre la voie du questionnement et la possibilité du développement personnel.


Dans son livre Philosopher et méditer avec les enfants (1CD audio), Alexandre Lenoir évoque Aristote qui estimait qu’on ne pouvait pas devenir philosophe avant 45 ans. Je n’ai pas trouvé d’autres sources pour m’assurer de la véracité du propos. Mais le propos reste intéressant dans ce qu’il suggère qu’il faudrait une certaine maturité pour « faire de la philosophie ».
Alexandre Lenoir conteste l’idée qu’il faille attendre si longtemps pour « apprendre à penser », comme serait selon lui le but de la philosophie. C’est sans doute que la philosophie, pour Aristote, n’avait pas le même sens. Pierre Hadot, philosophe et historien de l’Antiquité, a plutôt expliqué que la philosophie antique était réellement une façon de vivre et de mourir, le philosophe se posant alors comme un « sage » dont la volonté était de mener une vie vertueuse (Qu’est-ce que la philosophie antique ?). De ce point de vue, et compte tenu de ce qu’on avons présenté plus haut, le fait d’attendre un certain âge pour développer une attitude sage aurait du sens.

Si parfois, en tant que parents, vous êtes tentés de regarder derrière vous et de regretter des actions, du temps perdu, des bêtises passées, vous pouvez en venir à souhaiter que nos enfants ne passent pas par le même chemin. Alors vous posez des interdits, vous expliquez qu’il ne faut pas faire ça, vous vous fâchez… Jusqu’au jour où vous finissez par comprendre que si leur chemin passe par la reproduction de vos erreurs (ce que vous considérez comme des erreurs), alors vous ne pouvez rien y faire. Vous ne pouvez pas leur faire gagner du temps. Comme c’est le chemin qui compte et non le but, vous devez leur laisser vivre leur vie.


La vie par étapes ?

Jacques Ross a consacré un ouvrage aux âges psychologiques de la vie d’adulte. Il établit un chemin possible de progression au fil de l’existence.


Selon lui, si la fourchette des âges peut évidemment beaucoup varier selon les personnes, la logique de progression “idéale”, correspondant au rapprochement d’un état de sagesse au fur et à mesure de l’avancée dans la vie et l’accumulation d’expériences, serait la suivante :


  • l’âge de l’engagement, où l’on vit la liberté d’être (20-30 ans)
  • l’âge de l’accomplissement où l’exercice de la créativité est complet (30-45)
  • l’âge de l’intégration où débute la recherche de l’unité intérieure (45-60)
  • l’âge de la sérénité qui cultive la légèreté d’être (60-75)
  • l’âge du détachement (75-…)


Le détachement comme clé

Je suis particulièrement intéressée par cette vision d’un cheminement vers le détachement, qui est la clé d’une vie épanouie selon de nombreuses approches philosophiques. À la lecture des étapes de Jacques Ross, on peut se demander s’il faut réellement attendre si longtemps pour accéder au détachement. Une personne qui se dévouera toute entière à la connaissance et à son évolution spirituelle, sur le mode du retrait du monde, pourra sans doute y parvenir plus tôt.
Il semble en effet d’autant plus difficile de se détacher que l’on est investi dans la vie « séculaire ». Selon la tradition indienne, ce n’est qu’après avoir fondé une famille et qu’une fois que les enfants sont devenus autonomes à leur tour, que l’on peut envisager de se consacrer à son évolution spirituelle, de se retirer du monde et de ses flux pour se poser et se détacher.


En attendant une vie retirée pour ceux qui le souhaitent, il est tout de même possible de cultiver le détachement au quotidien. Et c’est notamment ce que propose le Karma Yoga.



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